31 - La Bataille de Paris

CONTEXTE DE LA 6ème COALITION 

La bataille de Paris

Face aux armées coalisées réunies, Napoléon a laissé les faibles corps des maréchaux Marmont et Mortier pour couvrir la capitale. Il y a aussi les troupes en formation dans les dépôts de Meaux, Paris, Fontainebleau et Versailles. Et enfin la garde nationale parisienne est là en dernier recours. Mais la défaite de Fère-Champenoise va précipiter la retraite des maréchaux sur Paris qui n'a pas été mis en état de défense.

S'étant aperçu de la marche des coalisés sur Paris à la bataille de Saint-Dizier, Napoléon accours à marches forcées par la rive gauche de la Seine. Mais il a trois journées de marche de retard sur les troupes coalisées. Paris doit tenir sans lui jusqu'au 1er avril.

Plan des forces en présence

Plan des coalisés

Les coalisés n’ont qu’un seul objectif : entrer dans Paris au plus tôt. Ils ont pour cela deux méthodes : forcer les portes de la ville et prendre la ville d’assaut, ou alors battre l’armée française en dehors des remparts puis bloquer les portes afin d’obtenir la reddition de la capitale. Les souverains coalisés, pour des raisons politiques, choisissent la deuxième option, tout en n’écartant pas la première si nécessaire. Delà, Schwarzenberg met en place un plan d’attaque relativement simple puisqu'il repose essentiellement sur l’énorme disproportion des forces. Il veut envelopper Paris par la rive droite sous ses immenses armées. Blücher, dont les troupes sont au Bourget, est chargé de mener l’attaque par la droite. Langeron doit marcher sur St Denis, Clichy puis sur Montmartre et le Bois de Boulogne. York et Kleist doivent prendre Aubervilliers, puis La Villette et la Chapelle. Vorontsov reste en réserve pour appuyer l’une des deux colonnes en cas de besoin. Au centre, Rajewski, appuyé par les réserves des gardes russe et prussienne, doit s’emparer des hauteurs de Romainville puis marcher sur Belleville. À gauche enfin, Wurtemberg et Giulay doivent marcher sur Nogent puis se séparer pour l’un marcher sur St-Maur et Charenton, l’autre sur Vincennes et Charonne.

Schwarzenberg espère ainsi qu’avant la tombée de la nuit, il aura contraint l’armée française à se replier dans la capitale, à l’abri des murs. Il est persuadé que la ville se rendra à la première sommation. Il compte lancer ces deux ailes en avant aux alentours de 9 heures, de façon à pourvoir commencer le combat vers les 11 heures sur l’ensemble du front. La pression concentrique des coalisés devrait amener les Français à se replier après quelques heures de combat.

Plan français

Les Français n’ont plus qu’un seul objectif : combattre pour l’honneur[3]. Ils savent que plus rien n’empêchera les coalisés d’entrer dans Paris. Tout le monde ignore que Napoléon est en grandes marches pour sauver sa capitale[4]. Mais même si on l’avait su, il n'est pas certain qu’on ait pu s’opposer aux coalisés pendant les 48 heures nécessaires. Et quand bien même aurait-on pu tenir jusqu’à l’arrivée de Napoléon et sa petite armée, l'armée française resterait en infériorité. Tout était perdu, sauf l’honneur. Car si Paris s’apprête à subir le même sort que les armées françaises ont fait subir à Milan, Rome, Amsterdam, Vienne, Munich, Berlin, Varsovie, Madrid, et Moscou, il ne sera pas dit que la capitale de France sera à son tour tombée sans combats[5]

Dispositions et forces en présence

La bataille se déroule sur la rive droite de la Seine, du bois de Vincennes au bois de Boulogne. L'armée française prend une position défensive, le gros des troupes entre Montreuil et La Villette. L'armée coalisée, ayant franchi la Marne à Meaux, débouche par Rosny, Bondy et Le Bourget.

Total de l'armée française: 18 000 fantassins et 5 500 cavaliers. Les garnisons comptent 2 000 hommes (gardes nationaux et troupes de lignes). La garnison de Paris ne compte que pour 8 000 hommes. Total effectif participant à la défense de Paris : 28 000 hommes, 5 500 cavaliers et 129 pièces d’artillerie de position et environ 30 pièces de campagne.

Total de l'armée coalisée : 103 700 hommes et 27 000 cavaliers dont 63 200 hommes et 20 000 cavaliers en première ligne et 40 500 hommes et 7 000 cavaliers en réserve. À noter que l'extrême droite du général Langeron participera très peu à la bataille en raison du retard dans l'arrivée des ordres de marche.

La bataille

 La bataille de Paris peut être divisée en trois secteurs :

 Secteur principal : Marmont:

Vers 5 heures[6], les Maréchaux se mettent en marche pour gagner leurs positions. Marmont charge les troupes de Compans, qui sont au pied de la butte Chaumont, de marcher sur Pantin et Romainville pour permettre au 6e corps de se déployer dans ses positions. Il veut que la division Boyer s’empare de Pantin, Ledru vienne au Pré-Saint-Gervais et que Compans s’empare de Romainville.

Fichier:Horace Vernet - La Barrière de Clichy.jpg

La Barrière de Clichy,  la défense de Paris le 30 mars 1814

Il est 16 heures trente. Le corps de Marmont est complètement resserré en arc de cercle au tour de Belleville. Le Prince Eugène, débouchant des Prè-Saint-Gervais et refoulant les divisions Compans et Boyer, parvient jusqu’aux premières maisons de Belleville. Au même moment les tirailleurs de Iermolov arrivent sur les arrières de Belleville par la butte Chaumont. Marmont voit le danger : il va se trouver encerclé dans Belleville. Malgré l’ordre formel qu’il a reçu de capituler plutôt que de livrer la capitale au pillage, il refuse pourtant de rendre les armes. Ralliant une poignée de braves (pour la plupart il s’agit de blessés qui se sont réfugiés dans le village ou d’unités qui ont été coupées de leurs divisions), le Duc de Raguse, suivit des généraux Ricard, Pelleport et Boudin, se met à la tête de la colonne. À pied, sabre au clair, il se lance dans une contre-attaque furieuse contre les troupes du Prince Eugène. Avec sa colonne d’environ trois cents hommes, il parvient à refouler les deux divisions russes, permettant à Lagrange et Boyer de reprendre leurs positions en avant du village. Poursuivant sa charge, Marmont se retourne contre les tirailleurs de Iermolov et les chasse de la plaine. Marmont, dont l’uniforme est criblé de balles, chute lourdement et reçoit une contusion. Les généraux Ricard et Pellport sont eux aussi blessés. Les deux tiers de sa colonne sont hors de combat. Mais Belleville est dégagé.

Il est bientôt 17 heures. Marmont, de retour à son QG reçoit les derniers rapports. Il se décide à capituler. Il envoie son aide de camp au Duc de Trévise pour l’informer de ses intentions. Mortier lui fait répondre qu’il n’a aucune autorisation de capituler, que c’est au Roi Joseph de traiter de tels sujets. Marmont lui fait suivre l’autorisation écrite que lui a donné Joseph. Le même ordre a été envoyé à Mortier mais il ne l’a jamais reçu. Mortier, à la lecture de l’ordre du Roi Joseph, donne son accord pour une négociation.

Il est 17 heures 30, l’aide de camp de Marmont revient avec l’accord de Schwarzenberg. On envoie aussitôt des aides de camp sur tout le front pour faire cesser les tirs. Ils ne cesseront qu’aux alentours de 18 heures.

 Secteur 2

 À 8 heures, Langeron débouche par la route du Bourget. Déjà son avant-garde attaque la brigade Robert (de la division Michel) à Aubervilliers. Robert tient les Russes à distance du village.

Vers 18 heures, les généraux russes de Rudzewicz et Kapczewicz marchent sur Montmartre défendu uniquement par 200 sapeurs pompiers, 100 vétérans et 7 pièces d'artillerie. Chargés à la baïonnette par plus de 10 000 Russes, les Français abandonnent la position et l'artillerie. Un peu plus tard, les Russes tentent de forcer la barrière de Clichy pour entrer dans la capitale. Moncey à la tête de 3 ou 400 gardes nationaux, appuyé par des civils sans armes, repousse l'assaut et fait dresser à la hâte des palissades en bois.

À 18 heures 30, Langeron reçoit un nouvel ordre formel de cesser les combats immédiatement. La bataille de Paris prend fin.

 Secteur 3

Un peu après 10 heures et demi, le corps de Wurtemberg fait son apparition à Nogent-sur-Marne. En peu de temps il fait replier sans effort les quelques postes français qui se retirent en partie sur Vincennes, en partie sur St-Maur. Les barrières même (celles du Trône et de Charenton) ne sont défendues que par 500 gardes nationaux et 8 pièces d’artillerie. Wurtemberg fait charger sa cavalerie pour chasser les 8e et 9elégions de Bercy. L’opération n’était pas douteuse et en quelques minutes les deux légions se replient derrière les remparts. Pourtant, Wurtemberg donne l’ordre de ne pas attaquer les barrières.

Il est 15 heures 30, les troupes du Prince de Wurtemberg cessent le combat. Seuls les canons de la garnison de Vincennes se font entendre sur cette partie du front. Contre tous les principes militaires, Wurtemberg ne force pas les portes qui sont pourtant largement à sa portée. Cette inaction ne peut découler que d’ordres formels émanant du Quartier Général pour des raisons politiques

 Bilan de la bataille

L'armée française perdit, dans la bataille de Paris, 6 000 hommes (3 500 tués, 2 500 blessés et prisonniers). Les coalisés perdirent 18 000 hommes, 8 000 morts et 10 000 blessés, pas de prisonniers. L'armée française assure la garde intérieures des barrières, les alliés la garde extérieure. Le corps Mortier se retira par le Pont d'Austerlitz et la barrière de Fontainebleau jusqu'à Villejuif. Le corps du maréchal Marmont (auquel fut réuni celui du général Compans) resta toute la nuit sur les Champs-Élysées avant de se mettre en marche à 4 heures du matin.

Les troupes du Prince Royal de Wurtemberg campent devant le bois de Vincennes, celles du centre entre Belleville e Mont-Louis, celles de Blücher à la Vilette, La chapelle et Montmartre enfin les gardes et réserves à Pantin et Romainville. Le Tsar donne l'ordre de doubler tous les feux de campement afin d'impressionner les parisiens. Le Général Barclay de Tolly est fait Feld-Maréchal sur le champ de bataille par le Tsar en personne.

La défaite française entraine la Capitulation de Paris puis l'entrée des armées alliées dans la capitale.

Fichier:Russparis.jpgL'entrée des troupes russes à Paris

 Le 30 mars, Paris est attaquée par Pantin et Romainville (Schwarzenberg) et par Clichy et Montmartre (Blücher). À la barrière de Clichy, défendue par Moncey qui commande la Garde nationale, a lieu la bataille la plus importante. Dans la soirée, les négociations sont ouvertes et dans la nuit, Marmont, avec la médiation de Talleyrand, signe un armistice : les troupes françaises évacuent Paris en direction du Sud.

Napoléon est à Juvizy lorsqu'il apprend la nouvelle[8].

Les Alliés décident de rétablir les Bourbons et de ne pas négocier avec Napoléon ; le lendemain, une proclamation correspondante est affichée dans Paris. Le Sénat organise (1er avril) un gouvernement provisoire présidé par Talleyrand, et déclare (le 2 avril) Napoléon déchu du trône, le droit d'hérédité aboli dans sa famille, le peuple français et l'armée déliés envers lui du serment de fidélité. Le 4 avril, par arrêt du gouvernement provisoire, il est permis aux conscrits rassemblés de retourner chez eux ; ceux qui sont encore dans leurs foyers sont autorisés à y rester. La même autorisation est accordée aux bataillons de nouvelle levée, ainsi qu'à toutes les levées en masse.

Occupation de Paris

Le 31 mars, à 7h, les armées alliées prennent le contrôle des barrières de Paris, qu'ils assurent conjointement avec la Garde nationale.

En même temps, de petits groupes de royalistes français sillonnent les rues désertes de Paris en criant Vive le Roi. Ils sont quelques dizaines mais leur audace et l'absence de réaction de la police font forte impression sur la population parisienne. Sur la place Louis XV, les royalistes font même lire la proclamation de Schwarzenberg aux habitants de Paris, datée de Bondy le 29 mars. Cette déclaration du commandant en chef des forces alliées appel le peuple de Paris à se soulever contre Napoléon et, implicitement, à rallier les Bourbons.

Vers 8h, le Tsar reçoit, aux environs de Pantin, l'ensemble des maires d'arrondissement de Paris qui lui remettent les clefs de la ville.

Ce n'est que vers 10h que, depuis la porte Saint-Martin, l'armée alliée fait son entrée dans Paris, en grande tenue. Les Cosaques de la garde impériale russe en tête, suivis des hussards et des cuirassiers prussiens, ouvrent la marche. Derrière, le Tsar, avec à sa droite le général Schwarzenberg (en tant que représentant de l'Empereur d'Autriche) et à sa gauche le Roi de Prusse. Ensuite vient une cohorte de généraux des états-majors du Tsar et du roi de Prusse. Puis l'infanterie des gardes russe et prussienne et enfin les réserves. Longeant les boulevards, le cortège est séparé de la cohue parisienne par des rangées de Gardes Nationaux, l'armée régulière ayant quitté la ville pendant la nuit. Bien que l’accueil réservé aux troupes alliées fût prudent dans les faubourgs, il en va autrement à partir de la porte Saint-Denis. En effet, les Parisiens, dont certains essayèrent de voir la scène du haut des arbres ou des toits, applaudissent et souhaitent la bienvenue aux Alliés. Mais, le cortège étant précédé par des royalistes à cheval et les troupes alliées, arborant un brassard blanc, non pas en signe de considération envers les Bourbons, mais simplement pour se reconnaître, en vue de la multitude de nationalités, les légitimistes croient en un retour rapide et certain de la monarchie, si bien qu'aux fenêtres, quelques cocardes blanches sont accrochées. Les royalistes, en passant devant la place Vendôme, tentent même de mettre à bas la statue de Napoléon, sans y parvenir.

Enfin la tête du cortège arrive aux Champs-Elysées vers 15h, où les souverains mettent pied à terre et s'installent pour voir défiler leur troupes et les passer en revue, jusque vers 17h, avant qu'elles ne ressortent de Paris par la porte de Neuilly. Certains régiments resteront camper sur les Champs-Elysées qui, à l'époque, ne formaient qu'une prairie déserte traversée par l'avenue, tels que les 20 000 Cosaques et Kalmouks, éveillant ainsi la curiosité des Parisiens.

Puis le Roi de Prusse prit ses quartiers dans l'Hôtel particulier du Prince Eugène, au 82 rue de Lille, tandis que le Tsar Alexandre se rendit chez Talleyrand au no 2 de la rue Saint-Florentin (aujourd'hui l’Hôtel Salomon de Rothschild)

 

Le même jour, à Fontainebleau, Ney, Lefebvre, Berthier, Oudinot, Moncey et Macdonald refusent directement à Napoléon de continuer les combats. Ce dernier signe une abdication conditionnelle, sous réserve des droits de son fils et de sa femme.

Cependant, Napoléon tente encore de renverser la situation. Il fait marcher une partie des troupes dont il dispose vers Paris, mais celles-ci, commandées par Marmont, se rendent aux Autrichiens.

 Appelé à Paris pour diriger les efforts des troupes qui défendaient les hauteurs de Chaumont, de Belleville, de Montmartre ; au moment d'atteindre sa capitale, il apprend que Paris vient de capituler. L'empereur alors envoie le duc de Vicence afin d'intervenir en son nom dans le traité qui va se conclure.

Pendant toute une nuit d'attente, Napoléon, protégé seulement par l'obscurité, voit s'allumer à ses pieds, dans la vaste plaine qui s'étend des fontaines de Juvisy à Charenton, les feux des bivouacs ennemis.

Enfin, à quatre heures du matin, il reçoit un courrier qui lui annonce que la capitulation définitive a été signée sans lui à deux heures du matin : aussitôt il monte dans sa voiture et se rend à Fontainebleau, qu'il ne devait plus quitter que pour l'exil.

Dès cet instant, bien que Napoléon n'eût pas encore abdiqué, les défections se multiplient autour de lui avec une désolante rapidité ; le sénat, si longtemps servile, retrouve quelque énergie pour l'abandonner ; ses lieutenants, ses maréchaux, tous ces grands dignitaires dont il a fait la fortune, le délaissent avec une honteuse audace ; Berthier, qui devait tant à Napoléon, s'enfuit des premiers vers Paris, en se faisant précéder de sa soumission, sans même dire adieu à son bienfaiteur.

En même temps Marmont vendait son corps d'armée,  et trahissait l'homme qui l'avait élevé si haut ; la convention conclue par le duc de Raguse brisa l'âme de Napoléon :

L'ingrat ! s'écria-t-il, il sera plus malheureux que moi !

Cependant, tous ne fuient pas devant le malheur : les soldats sont toujours dévoués, les revers n'ont pas ébranlé leur fidélité ; un mot de leur général, ils retournent au combat.

Napoléon, en réunissant les divers corps, peut encore former une armée de cent vingt mille hommes et disputer sa couronne aux alliés, non pas en partisan, mais en souverain. Au midi le maréchal Soult défend Toulouse et traite au nom de l'empereur Napoléon. Au nord le général Maison lutte victorieusement contre soixante mille hommes.

Un officier qui arrive de la Haute Loire dit à Napoléon l'enthousiasme des troupes et de la population, et le sollicite de rallier les armées du midi :

"Non, lui répond l'empereur, il est trop tard ; ce ne serait plus à présent qu'une guerre civile, et rien ne pourrait m'y décider."

Et avec tant d'espérances de succès, maître de sa situation, il signe la formule d'abdication dont les souverains alliés, François, son beau père, Alexandre, autrefois si fier de l'amitié du grand homme, font la condition absolue de la paix :

Les puissances alliées ayant proclamé que l'empereur était le seul obstacle au rétablissement de la paix en Europe, l'empereur, fidèle à son serment, déclare qu'il renonce pour lui et ses enfants aux trônes de France et d'Italie ; et qu'il n'est aucun sacrifice, même celui de sa vie, qu'il ne soit prêt à faire aux intérêts de la France.

Après cette renonciation, qui anéantissait non seulement ses droits personnels, mais encore ceux de son fils, de cet enfant couronné roi à sa naissance et salué des acclamations de l'Europe entière, Napoléon fut pris d'un découragement profond ; pour la première fois cette âme, inflexible devant tant de revers, se sentit impuissante sous le fardeau dont on l'accablait.

Un instant Napoléon voulut quitter la vie : dans la nuit du 12 au 13 avril, les longues galeries du château de Fontainebleau furent troublées d'un mouvement soudain ; les appartements intérieurs s'éclairèrent ; les valets de chambre et les garçons de service accoururent ; le maréchal Bertrand, le duc de Vicence, le duc de Bassano montèrent chez l'empereur et furent introduits dans sa chambre à coucher.

La cause de cette agitation resta d'abord inconnue ; plus tard seulement on sut, d'après un récit dont l'exactitude et l'impartialité n'ont pas été contestées, que Napoléon avait pris une forte dose d'opium que depuis la campagne de Russie il portait constamment sur lui.

Sa forte constitution résista à l'action du poison ; après une nuit de souffrances, les symptômes mortels disparurent, il fut sauvé, soit que la dose de poison fût trop insuffisante, soit que le temps en eût diminué l'action. Après cette passagère faiblesse, qui vint en quelque sorte prouver que le génie lui-même n'échappe pas aux angoisses humaines, Napoléon reprit toute son énergie :

"Dieu ne le veut pas !, s'écria t il "

et, avec une calme fermeté, il attendit sa destinée.. :

Les souverains alliés, maîtres de Paris et gardés par deux armées, dont les avant-postes cernaient Fontainebleau, redoutaient encore l'homme que l'Europe avait non pas vaincu, mais pour ainsi dire étouffé sous son poids.

Ce nom, qui seul valait une armée, retentissait incessamment à leurs oreilles ; au moindre mouvement, il leur semblait que l'empereur allait sortir triomphant de Fontainebleau et rentrer dans sa capitale.

 

                                                                                                                   

--->   31 -  les adieux de Fontainebleau

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